Programme 2012 du PS : Vive la démago-magie !
Ce n’est pas parce que, à ce stade, la droite manque cruellement de projets que toute idée farfelue est bonne à prendre puisque la gauche est seule à s’exprimer. Le dernier débat des candidats à la candidature m’a poussé à regarder de plus près le socle de leur programme et j’ai eu quelques difficultés avec leurs 12 premières propositions. C’est donc sans vergogne que j’étale ici ma naïveté sur les questions économiques et décortique chacune de ces propositions :
1. Pour muscler la compétitivité de la France : une banque publique d’investissement
Pour muscler la compétitivité de la France, nous créerons une Banque publique d’investissement, qui investira dans la recherche et l’innovation, soutiendra les PME-PMI, prendra des participations dans les activités stratégiques et les filières industrielles d’avenir, et dont les moyens seront mobilisés sous la forme de fonds régionaux en co-pilotage avec les Régions*
L’objectif est certes louable, mais la mise en œuvre buterait sur quelques difficultés sérieuses : Comment cette banque publique d’investissement financera les dits crédits ? Pas par une dotation de l’État puisque la France a perdu toute capacité à s’endetter. Par un recours à l’épargne populaire, peut-être ? Il s’agirait alors d’un jeu à somme nulle : les fonds placés ailleurs seraient confiés à cette banque pour qu’elle soutienne les projets du gouvernement. Bravo, mais cela réduirait pour partie les placements à risque (actions) qui soutiennent déjà directement les projets industriels et pour partie l’épargne réglementée qui soutien déjà d’autres programmes gouvernementaux comme le logement ou le développement durable.
Le système actuel critiqué par des candidats qui veulent nous gouverner mais dont les notions d’économie sont gravement déficientes à l’avantage de permettre aux banques de dépôt de financer l’économie en utilisant les fonds dont elles disposent mais en conservant pour elles mêmes les risques de crédit.
Dans le projet socialiste, c’est le contribuable qui, à travers une banque publique, porte le risque de crédit.
Comme on a déjà donné avec le Crédit Lyonnais de Bérégovoy, on peut rechigner à cette nouvelle offre !
2. Pour faire passer l’économie devant la finance : un impôt sur les sociétés modulable
Pour refaire passer l’économie devant la finance et pour réguler le système financier, nous baisserons l’impôt sur les sociétés de 33% à 20% pour les entreprises qui réinvestissent intégralement leurs bénéfices et l’augmenterons jusqu’à 40 % pour celles qui privilégient les dividendes des actionnaires ;
Noble projet mais pour quel résultat ? Les entreprises dynamiques qui créent de la valeur pourront choisir entre un impôt de 20% et un impôt de 40%. Je ne peux pas préjuger de leur choix, mais celles qui choisiront l’impôt de 20% s’enrichiront plus que les ôtres et leurs actionnaires qui retrouveront cette richesse accrue dans le cours de bourse pourront remplacer le dividende par une cession partielle d’actions.
Certes cette réduction des impôts est une manne pour nos entreprises mais où le PS récupèrera-t-il le manque à gagner ?
nous instaurerons au niveau européen une taxe de 0,05 % sur les transactions financières ; nous lutterons pour la suppression des paradis fiscaux ; nous séparerons les activités de dépôt et d’investissement des banques ; nous créerons une agence de notation publique européenne.
Le PS a décidé qu’il instaurerait la taxe Tobin au niveau européen comme s’il avait le pouvoir de le faire. Elle existera peut être avant qu’ils n’aient à gouverner. Mais dans ce cas Mondebourg qui semblait la soutenir, répètera comme il l’a dit dans le débat "Il ne faut pas avancer des solutions de droite dans une primaire de gauche" car pour un socialiste, un médicament efficace ne saurait être mis en circulation s’il a été conçu à droite !
Pour la séparation des activités de dépôt et d’investissement tout comme pour l’agence de notation publique européenne, je vous renvoie à mes critiques précédentes (cf. Florilège de la campagne présidentielle).
4. Pour l’emploi des jeunes : 300.000 emplois d’avenir
Pour l’emploi des jeunes, nous créerons 300 000 « emplois d’avenir » dans les domaines de l’innovation environnementale et sociale.
Bon voilà une dépense supplémentaire de quelques 6 milliards par an qui doit correspondre à une économie du même montant rigueur socialiste oblige. Mais où est donc cachée cette économie ?
5. Pour protéger les salariés : dissuader les licenciements boursiers
Pour protéger les salariés, nous créerons une sécurité sociale professionnelle, matérialisée par un compte temps-formation, permettant à chacun de reprendre des études, de réaliser un projet personnel, de s’occuper de sa famille et choisir les modalités de son départ en retraite.
En augmentant les charges qui pèsent sur les entreprises du privé on freine l’évolution des salaires pour financer ces surcoûts. On réitère les erreurs des 35 heures : le salarié n’aura plus le choix, il devra ainsi payer d’avance pour une formation, des études ou un projet personnel qu’il en profite ensuite ou non !
Nous dissuaderons les licenciements boursiers par des pénalités financières pour les entreprises qui en même temps versent des dividendes à leurs actionnaires.
Génial ! Comme les entreprises en verseront plus de dividendes (voir le N°2 ci-dessus !) les licenciements boursiers seront remis au goût du jour par le gouvernement socialiste.
Pour protéger les intérêts de l’Europe, de ses savoir-faire et de ses salariés dans la mondialisation, pour mieux réguler le commerce, nous agirons pour augmenter les droits de douanes sur les produits provenant de pays ne respectant pas les normes internationales en matière sociale, sanitaire ou environnementale.
Je souscris pleinement à cette proposition !
7. Pour réduire l’endettement de la France : réaffecter la moitié de nos marges financières
Pour réduire l’endettement de la France, nous affecterons à la réduction de la dette la moitié des marges financières que nous dégagerons
Intention louable, résultat détestable ! Nous avons ici un projet qui ne propose aucune marge financière, pire qui ne justifie par des économies aucune des nouvelles dépenses électoralistes qu’il propose.
Si 50% du déficit sera affecté à la dette pour l’augmenter d’autant, que deviendront les ôtres 50% ?
8. Pour encourager les comportements écologiques : une TVA éco-modulable
Je souscris pleinement à cette proposition !
10. Pour sortir de la dépendance du nucléaire et du pétrole : développer les énergies renouvelables
Pour sortir de la dépendance du nucléaire et du pétrole, nous développerons massivement les économies d’énergie et les énergies renouvelables et nous proposerons à nos partenaires la mise en place d’une Communauté européenne des énergies. Nous organiserons un débat national sur la transition énergétique dès 2012.
Cette proposition n’en est pas une car on fait l’impasse sur les questions économiques alors que l’argent fait défaut et qu’il peut y avoir des charges lourdes à la clé. Je vous renvoie à mon analyse précédente de la question : (cf. Le nucléaire ou l’énergie du désespoir, peut-on s’en sortir sans sortir ? )
Pour alléger la facture énergétique des Français, nous réinvestirons une partie des superprofits des groupes pétroliers dans des aides à l’isolation, le développement des énergies renouvelables et la mise en place de tarifs sociaux pour le gaz, l’électricité et l’eau
La démago-magie des programmes électoraux bat son plein. Que l’État dispose des superprofits des groupes pétroliers c’est bien surtout si c’est pour que je paie moins cher le développement des énergies nouvelles, mais regardons de plus près cette proposition :
· De quels superprofits s’agit-il ? Certainement pas des profits que font EXXON ou SHELL ailleurs dans le monde, on doit parler de la France où TOTAL est le plus gros. N’est-il pas vrai que Total ne génère aucun profit en France ? Si c’est vrai, comment le taxer suffisamment pour que la proposition socialiste ait du sens ?
· Le groupe TOTAL est né de la fusion de TOTAL avec PETROFINA puis avec ELF ce qui en a fait un champion français du pétrole. Alors est-il scandaleux que les profits nés de la synergie de ces trois groupes soient ce qu’ils sont ? Si c’est si scandaleux, pourquoi Jospin avait-il donné son aval à cette fusion ?
12. Pour stopper l’envolée des loyers : plafonner à la première location ou la relocation
Pour stopper l’envolée des loyers, nous plafonnerons leur montant lors de la première location ou à la relocation, notamment dans les zones de spéculation immobilière et nous financerons la construction de 150 000 logements sociaux par an.
Bon, si on admet que "nous financerons" signifie seulement la prise en charge des frais financiers et non pas de l’investissement, il s’agit d’une dépense nouvelle limitée à quelques 300 millions d’euros par an. On aimerait quand même en connaître la contrepartie côté économies.
Voir en ligne : http://blog.francetv.fr/blogistan-a...