Le Goût du Bon Pain Article imagé

, par  DiaOulRu , popularité : 45%

Le goût du bon pain ?

Formule datant du début des temps, déguisés en pâteux, nous venons de tester le four chauffé aux braises. Au bout d’un bâton, nous avons fait croustiller un bout de laine vierge qui signale que la chaleur est à point. La pâte au levain et aux trois farines a levé toute la nuit et le seigle, le blé noir et le froment ont été malaxés, retournés et battus ce matin comme Ben Chemoul et l’Ange Blanc contre le Bourreau de Béthune et Roger Delaporte, du temps des matchs de catch commentés par Claude Darget et Roger Couderc au Central Parisien.

Ah, le pain ! Résultante d’un long chemin agricole, technologique, artisanal et gastronomique, celui que nous consommons aujourd’hui n’a pas le même goût que celui d’avant. Semé à l’automne après les labours, le blé est récolté l’été suivant. Semis, tallage, montaison, épiaison sont les différents stades de développement de la plante. A la récolte, la tige creuse, le chaume ou la paille se termine par un bel épis doré rassemblant les grains qui seront moulus pour donner la farine, idéalement faite par la traditionnelle meule d’un Messire Meunier Maître Cornille et de son moulin.

Mais quelle farine ? On en a identifié pas moins de plus d’une centaine et demie d’arômes de notes florales différentes dans le pain suivant le frasage, correspondant au brassage et au mélange des ingrédients en deux étapes, le mélange puis l’incorporation, notamment du sel. Travail du Pistore et du Talmelier anciens noms des Boulangers, les faiseurs de la croustillante grigne, la croûte du pain.

Ce qui sort de l’ordinaire des ‘laboratoires industriels’ de notre époque, ce sont les bannettes à la croûte rustique et aux arômes subtils, les bannetons et les pâtons issus de leurs paniers en osiers dont ils prennent la forme, les pains de pays aux farines diverses préparées au levain, les boulots, les faluches, les foués, les fougasses, les gâches, les bûcherons, les épis, le bis, le blanc, le complet avec sa repasse incorporée, le bâtard, la ficelle, la baguette, la boule, le quatre livre et les autres, typiques à leur pays et leur région.

Après ‘l’indépendance’, j’avais retrouvé un bon Ami Pied Noir qui après les ‘évènements’ s’était rapatrié dans le sud ouest avec les siens. Avec lui, troufions, nous avions fait les moissons dans la plaine du côté de Mascara et ce blé débarquait des bateaux dans les ports du Languedoc et du Golfe du Lion pour agrémenter l’ordinaire de mes compatriotes, avant les gros rendements des céréaliers métropolitains actuels. Le rendement à l’hectare était moyen mais étant donné la surface cultivée, les remorques étaient pleines à ras bord de beau blé doré. Il avait repris l’exploitation des terres de ses Parents après avoir été démobilisé en 1945 de l’Armée venue d’Afrique et sa plus belle récolte avait été celle, comme un fait exprès, de l’année où il avait décidé de s’expatrier de son Pays, l’Algérie. Il avait pu tout de même sauver sa récolte grâce à ses copains d’école, algériens qui lui avaient promis de la lui acheter.

Moisson en AFN et tickets de pain en Métropole

Après la guerre, nous avions apprécié le pain blanc américain conservé dans des boites en fer blanc et en avions aimé son goût médiocre car notre pain quotidien manquait et nous en avions faim. J’ai retrouvé, collé sur une vieille carte d’identité de mon Père trois tickets de rationnement qu’il avait conservé au cas où. Nous ‘avions droit’ à 240 grammes de pain par jour, catégoriés ‘J’… à condition d’en trouver à acheter. Combien de fois j’ai fait la queue, gamin et arrivé au bout, il n’y en avait plus.

Ce Pain Quotidien a tellement pris d’importance dans notre vie qu’il est passé dans notre langage comme :

« … alors compagnons de la boulange, ça ne mange pas de pain de gagner son pain et d’avoir du pain sur la planche pour éviter d’être au pain sec et courir après la miche qu’au médecin, sans retirer pour autant le pain de la bouche des copains en ne mangeant pas de ce pain là. C’est être né pour un petit pain de réussir mieux en pain qu’en farine, de manger son pain blanc et être fait comme du bon pain. Car à manger le pain du Roi, on risque de prendre un pain, avoir la moitié de son pain cuit et qu’on nous fasse passer le goût du pain pour n’être qu’une planche à pain. Vaut mieux faire son pain et avoir mangé plus d’un pain ! Hé ! Hé ! »

Notre Pays… est un drôle de Pays où la rhétorique égalitaire est contestée dans les faits par une persévérance vitale de ses administrateurs à promettre et ne rien faire. La soit disante ventilation sociale variable suivant un bon vouloir faussement naïf, sorte de schizophrénie à la française produisant des tiraillements et des déchirements hexagonaux trop souvent sans résultats positifs. A notre époque de régression identitaire, certains apprentis sorciers issus d’arbres généalogiques greffés aux mauvaises pousses de plans sauvages et insociables veulent reconstruire notre Pays avec de bonnes graines, certes mais aussi de graines contenant de l’ivraie poussées dans des alluvions de mauvaises volontés citoyennes, qui proviennent du hors de nos cultures, ce qui risque dans nos basses cours en tant que mauvaise nourriture, de faire voler des plumes de protestations si bas qu’elles aboutiraient nous faire passer le goût de notre bon Pain si elles servent aussi à cela. Ce qui j’espère, ne sera pas demain la veille, les plumes pouvant se faire arracher au derrière dans n’importe quel poulailler de nos voisins, notre vieille République étant par définition résistante à l’esprit monarchique moyenâgeux de tous temps même si des plans successifs de relancement massif ne supposent que de régler les problèmes d’ordre économique, mais pas culturels ni religieux et que l’on nous affirme que le Monde sera différent de celui d’hier et que tout va changer. Il faut être adepte de la pensée de Monsieur de la Palisse pour n’en s’être pas aperçu !

N’est-ce pas votre opinion ? Sinon, exprimez vous !

En attendant cette éventuelle fin des haricots, ce soir, on va se couper un ‘tailloir’ et s’en déguster une ‘bonne tranche’ sur laquelle on trouvera bien quelque chose à mettre dessus ; un casse-croûte beurre et jambon blanc de cochon par exemple, en pensant à ceux qui en manquent du pain par rapport à d’autres qui profitent un peu trop du nôtre et qui nous dénigrent.

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