"OVER THE TOP" les opérateurs !!! A qui la première place ?
« I’m in the basement, you’re in the sky » (« Je suis au sous-sol, tu es dans le ciel »), chantait le groupe Placebo.
C’est le refrain qu’entonnent aujourd’hui les opérateurs télécoms européens.
Sous la houlette de Neelie Kroes le site, la commissaire européenne au numérique, ils commencent à réfléchir à la manière de contrer l’offensive des nouveaux conquistadors baptisés les OTT (pour « over the top », au sommet).
Sous cet acronyme se cachent Google, Amazon, Skype, Netflix, Apple ou Facebook.
Ces plateformes utilisent les réseaux Internet pour transporter leurs propres contenus jusqu’au consommateur final. Mais aujourd’hui, leur poids dans les réseaux mondiaux est devenu gigantesque. Selon le dernier rapport « Global Internet Phenomena Report », Netflix accapare 30% des flux descendants aux Etats-Unis en heure de pointe. YouTube en consomme 11%, iTunes 3,25% et Facebook encore seulement 2%.
A eux quatre, ils pèsent déjà 45% du trafic Internet américain !
Ces plateformes veulent désormais se greffer au-dessus des réseaux existants pour contrôler eux-mêmes leur trafic. Mais ils ne veulent pas pour autant être soumis aux mêmes règles, ni aux mêmes contraintes. En clair, ils ne veulent pas être interconnectés aux autres opérateurs et ne veulent pas s’embêter à collecter du trafic. Et par-dessus tout, ils ne veulent pas être régulés par la "Federal Communications Commission aux Etats-Unis", par les directives européennes du « paquet télécom » ou par les régulateurs locaux comme l’Arcep en France et l’Ofcom en Grande-Bretagne. Le beurre et l’argent du beurre.
Schématiquement, ces plateformes qui revendiquent haut et fort le maintien de la « Net neutralité », agissent en fait à l’inverse. Ils cherchent à garantir la qualité de service pour leur propre trafic, sans se soucier des données des autres sites.
Pour ce faire, il leur suffit d’acheter de la capacité Internet aux véritables opérateurs et de gérer sa disponibilité et sa qualité grâce à des équipements (routeurs, serveurs de cache) disposés partout sur la planète, comme ceux de Cisco ou d’Akamaï.
Les plateformes OTT et les opérateurs se livrent actuellement à une véritable guerre de position. Les premières descendent dans la chaîne pour capter une partie de la valeur des opérateurs télécoms dans la gestion du trafic Internet. Les seconds veulent monter pour créer des plateformes concurrentes de celles des OTT.
Malheureusement, on devine déjà l’issue de la bataille. Il n’est pas très compliqué d’acquérir des compétences télécoms : les ingénieurs, la bande passante et les équipements de réseau sont légion sur le marché. Il suffit d’y mettre le prix. En revanche, il est très difficile d’être créatif et d’inventer le YouTube ou le Facebook du futur. Jamais les opérateurs télécoms n’ont réussi à imposer leur portail sur les écrans des PC de leurs clients ADSL. La page d’accueil est souvent Google, rarement Orange ou SFR. Ils n’ont malheureusement pas le génie du logiciel pour développer de belles interfaces.
Les opérateurs risquent de se retrouver les soutiens de l’Internet du futur. Les OTT se réservent le ciel.
Par Enguérand Renault
LE FIGARO
Voir en ligne : http://plus.lefigaro.fr/page/enguer...