MUR DES DISPARUS – An I -

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par José Castano

MUR DES DISPARUS – An I -

Il y a un an, le 25 novembre 2007, eu lieu à Perpignan, à l’initiative du Cercle algérianiste local et de sa présidente, Suzy Simon-Nicaise, l’inauguration du mur des disparus. Moment émouvant, solennel, inoubliable, empreint d’une grande tristesse, certes, mais aussi de dignité, de fraternité et d’amour.

Si les médias nationaux ont occulté –comme à leur habitude- cette cérémonie du souvenir et de la mémoire à l’exception du quotidien local « L’Indépendant », la solidarité des associations de Français rapatriés d’Algérie a été remarquable et a permis par l’intermédiaire de leur bulletin de liaison de rapporter l’événement dans les contrées les plus reculées de cette « douce France » si égoïste et si indifférente au regard de cette tragédie…

Il me paraît cependant important –et ce n’est que justice- de noter la mobilisation de certains médias métropolitains « politiquement incorrects » tels que « Rivarol » qui s’était déjà illustré en prenant, en son temps, ouvertement parti pour « l’Algérie française » et de « Présent » toujours sur la brèche quand il s’agit de défendre cette mémoire. Notons aussi l’implication de « Rizières et Djebels », organe de l’Association des Combattants de l’Union Française du Var dont le Président (patos), Serge Jourdes, est l’exemple même de ces valeureux soldats métropolitains qui ont tout sacrifié au combat pour l’Algérie française. Et un grand merci à Bernard Antony (autre patos) qui, au sein de son association « France fraternelle », a multiplié sans relâche ses actions pour que soit connue la tragédie des disparus d’Algérie.


Au nom des familles de nos chers disparus : qu’ils en soient remerciés !

… Et pour ceux qui ignoreraient encore ce qui s’est passé ce jour là, voici le compte rendu de cette manifestation sous la forme d’un article de presse rédigé le 26 novembre 2007 et publié par les quotidiens « L’Indépendant » et « Présent »

LE MUR DES DISPARUS

Lors du colloque sur « Les Disparus d’Algérie » organisé à Perpignan en 2004 par le Cercle algérianiste, promesse avait été faite aux milliers de congressistes d’ériger dans cette même ville un mur symbolique où seraient mentionnés les noms recensés de toutes les victimes de cette tragédie.

Cette promesse a été tenue et sous l’impulsion de Suzie SIMON-NICAISE, Présidente du Cercle de Perpignan, vice-présidente nationale, cette œuvre admirable a été réalisée et inaugurée, le 25 novembre 2007 en présence des autorités civiles, militaires, du représentant de l’Etat, d’un piquet d’honneur et de la musique de la Légion étrangère.

Cérémonie merveilleuse et émouvante qui réunit plus de sept mille personnes, rehaussée par la présence des familles de disparus, solidaires et dignes dans leur malheur et que le temps n’a pas suffit à consoler.

Admirable chef d’œuvre en bronze représentant un martyr au cœur arraché, bâillonné dans sa souffrance, le regard dirigé vers le ciel comme pour exhaler une ultime prière. De part et d’autre des plaques également en bronze où sont recensés les milliers de noms des disparus qui, depuis près d’un demi siècle, vivent toujours dans le cœur des familles.

Ainsi, 45 ans après la fin du drame algérien, le rideau est tombé sur ce terrifiant épisode de cette guerre qui ne voulut jamais dire son nom… 45 ans de rêves évanouis, d’espérances trompées, de souffrances imméritées et de morts prématurés... 45 ans de silence, d’indifférence, d’égoïsme et de mépris.

Pendant 45 ans nous avons attendu la reconnaissance de ce génocide, pendant 45 ans nous avons vu partir bien des nôtres, écoeurés de tant de mensonges et de lâchetés, désespérés de n’avoir pu, jamais, se recueillir devant la moindre sépulture.

Sont-ils morts ou encore vivants ? Ah ! atroce présomption ! Combien de fois ont-ils dû se poser cette question ? Et leur souffrance s’exacerbait au fil des ans, à l’idée qu’ils n’avaient pas même une tombe pour prier, causer et pleurer sur de vieux souvenirs.

Oui, il a fallu attendre 45 ans et par la volonté, l’opiniâtreté d’une équipe merveilleuse… et d’un financement privé, un mémorial -honoré par des responsables politiques- et devant lequel, désormais, pourra se recueillir tout un peuple, a vu le jour.

Qu’on est loin du régime gaulliste, de ses magouilles et de ses corruptions ! En quelques minutes un vent nouveau a submergé ce lieu désormais sacré mettant fin au règne de l’opaque et balayant d’une rafale les miasmes de l’injustice, de l’égoïsme et de l’indifférence.

« Enfin » !… C’est aussi le cri de tous ces braves gens –parfois très âgés- qui ont bravé la distance et le froid et ont apporté leur concours pour la réalisation de cette œuvre : Pieds-Noirs de toutes confessions et de toutes origines, humbles et riches qui, conquis par le courage, la volonté, la ténacité de cette équipe perpignanaise, ont découvert, en ce lieu chargé d’intense émotion, autre chose que la mesquine laideur des préjugés fortement établis.

Aux discours officiels chargés de promesses, retenons celui empreint d’un trouble difficilement contenu prononcé par Suzie et cette lettre sublime écrite par Maurice Calmein à l’attention d’un père disparu. Que de larmes furent versées en cet instant !

Puis la musique de la Légion entama les première notes des « Africains ». Des milliers de voix, brisées par l’émotion, la relayèrent. Des chœurs incohérents flottèrent au-dessus des têtes comme des oriflammes balancés par le vent et de la clameur retrouvée, s’éleva, poignant, superbe, l’hymne de nos pères qui élève les héros jusqu’au cœur des dieux et les transmue en forces universelles gravé dans le pathétique comme une prière cadencée par un rythme solennel.

Comme sur des ailes, portées par ces larges voix, il semblait que les âmes de tous ces innocentes victimes qui avaient payé de leur vie la rançon de la folie criminelle des hommes, quittaient leur tertre et s’élevaient jusqu’à Dieu, jusqu’à l’immortel esprit des choses.

Tout au long de la journée, des milliers de personnes défilèrent, se recueillirent et pleurèrent devant ce mémorial exprimant ainsi un aveu toujours contenu : 45 ans après leur exode, ils ne font que survivre loin de leurs paysages dorés qui ont émerveillé leur enfance. De cette terre douce et triste, tombeau de leurs aïeux et nid de leurs amours, un immense vide les sépare, fait de sable, de regrets, de mirages, de promesses et de serments révolus, où s’irréalisent les oasis perdus de leurs souvenirs.

Un souvenir, voilà ce qui leur reste aujourd’hui : un souvenir cruel. Mais ils savent qu’il restera à jamais vivant dans leur mémoire, que les vagues avec le temps murmureront longtemps autour de ce souvenir là ; dans les tempêtes elles bondiront comme pour venir lécher leurs pieds, ou les matins de printemps, quand les voiles blanches se déploieront et que l’hirondelle arrivera d’au-delà des mers, longues et douces, elles leurs apporteront la volupté mélancolique des horizons et la caresse des larges brises. Et les jours ainsi s’écoulant, pendant que les flots de la grève natale iront se balançant toujours entre leur berceau et leur tombeau, le cœur de tous ces martyrs inscrit à jamais dans le bronze, devenu froid, lentement, s’éparpillera dans le néant, au rythme sans fin de cette musique éternelle.

José CASTANO

Pour la visite du mémorial national des disparus, prendre contact avec le Cercle algérianiste de Perpignan : Tel. 04.68.35.51.09

e-mail : cercle-algerianiste.perpignan@orange.fr

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