L’abolition de la peine de mort, un progrès décisif pour l’Humanité ? 30 ans pour les tueurs de flics, et pourquoi pas un blâme ?

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Pendant les vacances, Notre Journal vous propose chaque semaine un morceau choisi des tribunes de Nemo. Alors que les gazettes ne parlent que de la politique sécuritaire fascisante de notre président bien aimé, il nous a paru opportun de revenir sur l’abolition de la peine de mort, un monument de manipulation de l’opinion publique que Nemo dénonçait dans sa tribune du 11 avril...

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...Ce vote historique, célébré encore aujourd’hui comme le principal fait d’arme de 14 ans de règne de François Mitterrand était voulu par moins d’un tiers des Français. Ce qui n’a pas empêché nos élus, se souciant comme d’une guigne de l’opinion du bon « Peuple », de faire franchir à la France ce pas décisif qui était supposé la sortir à jamais de l’obscurantisme – vous avez pu constater comme moi combien la France et le Monde se sont éclairés depuis lors.

Tant et si bien qu’il est tellement acquis dans l’inconscient collectif que la peine de mort, comme la « question » ou le bûcher, est abolie jusqu’à la fin de l’humanité, qu’aucun parti politique n’envisage sérieusement son rétablissement, ou bien du bout des lèvres, et pour des cas tellement atroces qu’ils relèveraient plutôt de la psychiatrie que de la justice.

Pourtant, encore aujourd’hui, il est vraisemblable qu’une majorité des Français souhaiteraient son rétablissement. Bien mieux, s’il vous venait à l’idée de reprendre les arguments péremptoires des abolitionnistes, il ne devrait pas vous être interdit de penser qu’ils ne pèsent pas si lourd qu’on vous l’a enfoncé dans le crâne. Reprenons-les, juste pour la démonstration :

- La peine de mort est barbare. C’est incontestable ! Traîner un pauvre diable, aussi coupable soit-il, jusqu’à une machine infernale, la tête qui tombe, le sang qui gicle… Beurk. Pour rien au monde vous ne me feriez prendre la place du bourreau, même pas celle du spectateur. Pourtant, si on y réfléchit calmement, de préférence ailleurs que dans la cour d’une prison où on a dressé la guillotine, qu’est-ce qui est plus barbare : procurer à un être humain, qui s’est banni lui-même de la Société par un crime abominable, une mort rapide qui efface tout, ou l’enfermer pendant des dizaines d’années ? Pour moi, c’est clair : le destin de l’homme est de mourir, pas de vivre enfermé.

- Appliquer la peine de mort à un criminel, c’est se mettre au niveau de son crime. Tiens donc : la Société n’aurait pas plus de raison d’ôter la vie à un assassin qu’un assassin de s’en prendre à une victime innocente (je précise « une victime innocente » parce que le droit Français d’avant l’abolition ne prévoyait la peine de mort qu’en l’absence totale de circonstance atténuante) ? Dans le temps, quand les mots signifiaient quelque chose, on qualifiait ce genre d’argument de sophisme.

- Les erreurs judiciaires sont fréquentes, et la peine de mort est irréversible. Si on en croit les abolitionnistes, les cimetières seraient remplis de suppliciés innocents. Mais si on creuse un peu, les abolitionnistes resservent systématiquement deux affaires, Buffet et Bontemps, et Ranucci !

Il y a l’ « affaire Buffet et Bontemps » – Buffet, en prison pour assassinat, avait égorgé de sang froid l’infirmière et le gardien pris en otage pendant leur tentative d’évasion de la prison de Clairvaux. Bontemps n’aurait été que le complice passif. Les deux ont été exécutés… Peine cruelle, injuste pour Bontemps qui n’avait pas de sang sur les mains, mais pas erreur judiciaire.

Et il y a l’ « affaire Ranucci », l’Erreur Judiciaire avec un grand « E ». Les abolitionnistes ne vont pas jusqu’à mettre leur tête à couper que Ranucci était innocent, on ne sait jamais, mais ils assènent qu’il y avait un énorme doute, et que le doute aurait dû, en toute logique, profiter à Ranucci ! Il est vrai que le doute est un principe du Droit, et ces braves gens auraient raison si la prétendue erreur judiciaire n’était pas une fiction montée par Gilles Pérault, auteur du « Pull Over Rouge », et partisan de l’abolition de la peine de mort, lequel Perrault se sert de Ranucci et de la petite victime pour étayer sa cause : Pour lui, les preuves qui accablent Ranucci ont été fabriquées par la Police, et ses aveux extorqués. Si on a trouvé le couteau là où Ranucci a indiqué qu’il se trouvait, c’est la Police qui lui a indiqué l’endroit. Ranucci a un accident, on le poursuit, il se sauve dans les bois et on trouve la petite fille morte là où il s’est sauvé ? Ranucci n’a pas eu de chance : il a suivi le même itinéraire que l’assassin, une coïncidence ! Les aveux ? Une pression intolérable ! Des précisions apportées par Ranucci qui correspondent en tous points aux constatations du crime ? Il les a trouvées noir sur blanc dans la presse, quand ce n’est pas la Police qui les lui a soufflées !

- la peine de mort n’est pas dissuasive, la preuve, elle n’empêche pas les assassins d’assassiner. Et puis savez-vous que Patrick Henri avait assisté au procès de Buffet et de Bontemps ? Ça ne l’a pas arrêté… Quant on vous dit que ça ne sert à rien ! Bien sûr, on admet, un peu gêné, que depuis l’abolition de la peine de mort, on tire plus facilement qu’avant sur la Police. Mais surtout pas de conclusion hâtive. Il n’y a aucun lien, non, non. Ce n’est surtout pas parce qu’avant, tuer un flic, c’était la "veuve" garantie. C’est parce que la Société est de plus en plus injuste.

- la peine de mort est raciste ! C’est un fait : en Amérique, on exécute beaucoup plus de Noirs que de Blancs. Très bien. Alors, puisqu’il en est ainsi, soyons logiques jusqu’au bout : comme il est de notoriété publique, malgré l’interdiction des statistiques ethniques, que la population carcérale est constituée à environ 70% de membres de "minorités visibles", il faut supprimer les peines de prison, qui sont à l’évidence racistes.

- la peine de mort coûte plus cher que l’enfermement de longue durée. Ça, c’est le dernier argument à la mode des abolitionnistes américains ! Ils ont raison. Ils oublient seulement de préciser qu’aux USA, les droits de la Défense ont été poussés jusqu’à un tel degré d’absurdité qu’un condamné à mort, avant que tous les recours soient épuisés, peut attendre 10 à 20 ans son exécution. Le coût du fromage et du dessert ! Et puis oui, faire attendre un homme des années, en lui disant qu’il va mourir dans un mois, et une heure avant l’exécution on lui dit que c’est reporté de trois mois, et ça recommence… ça, c’est atroce, inhumain et barbare. Alors que les Américains se décident, ou bien ils exécutent, et ils le font rapidement et proprement, ou alors ils abolissent la peine de mort, et ils gardent les condamnés en prison, mais pas les deux à la fois. Cela dit, si on veut faire à tout prix des comparaisons, en Chine, par exemple, le coût de la peine de mort est particulièrement compétitif, et en plus c’est la famille du condamné qui paie l’exécution.

- Je terminerai par l’argument avancé à l’époque par Badinter, et que je trouve pour ma part répugnant : la peine de mort ne console pas les familles de victimes. Ah oui ? Qu’est-ce qu’il en sait, Badinter ? Sans doute pense-t-il que ça doit être un réconfort, pour la mère d’un enfant violé et assassiné, pour l’épouse d’un flic abattu par un voyou, de se dire tous les matins en se levant qu’au même moment, l’assassin de leur fils ou de leur mari se réveille dans sa prison ; tous les soirs, qu’il s’endort, peut-être en rêvant à l’enfant qu’il a violé, ou à son exploit d’avoir descendu un keuf… Et tous les jours, le journal, les infos à la radio, et l’angoisse de lire ou d’entendre un jour que le bourreau de l’enfant ou du flic va être libéré pour bonne conduite. Ce n’est pas de la barbarie, ça ?

Mais bien sûr, dans nos sociétés sorties de l’obscurantisme depuis que la peine de mort a été abolie, il n’y a pas de coupables qui ne soient des victimes… Puisque l’homme nait naturellement bon, c’est la Société qui nous rend mauvais…

Et voilà comment une minorité, au nom d’une idéologie dont le bon sens n’est pas la qualité première, interdit à une majorité de penser autre chose que ce qu’elle a décidé qu’elle devait penser.

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