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KOSSOVO, un an déjà
Reprise intégrale de la note d’information
« Une année de peurs et d’incertitudes »
Malgré mon regard attentif sur les articles de presse parus aujourd’hui, je n’ai pas trouvé de gros titres ressemblant de près ou de loin au mien : « une année de peurs… ». Non, à en croire les « grands » journalistes des « grands » médias, il s’agit plutôt d’une année de bonheur, d’une année d’espoir. Je ne vous apprendrai rien en vous signalant qu’aujourd’hui, le 17 février 2009, cela va faire un an que les Albanais du Kosovo ont déclaré leur indépendance. Nous avons droit à un florilège de témoignages et de reportages tous plus sirupeux les uns que les autres. Le citoyen lambda doit même sans le savoir être heureux aujourd’hui, un peuple que l’on a tenté d’exterminer fête son premier anniversaire. C’est un peu comme un bébé qui souffle une bougie pour ses un an, c’est toujours mignon et attendrissant.
Permettez-moi cependant de douter, puisque paraît-il, le doute est le premier signe d’intelligence, de la « vérité vraie » vendue aujourd’hui dans les kiosques. On remarque d’ailleurs au passage, que ceux qui nous vendent sans cesse l’impossibilité (quasi scientifique) d’une vérité unique (transcendante ou pas) se retrouvent tous à émettre la même opinion quasi dogmatique lorsqu’il s’agit de parler du Kosovo. Il est consternant de voir autant d’articles similaires du titre à la conclusion. Un pigiste au final, c’est comme un mauvais élève, il copie sur le voisin qui a lui-même piqué la correction au prof : l’AFP. Et le zéro pointé il est pour quand ?
Bien peu de ceux qui vont parler de ce sujet auront mis les pieds ne serait-ce qu’une seule fois au Kosovo. Et les envoyés spéciaux qui nous montreront ce soir les feux d’artifices de la « fête » au JT de TF1 ne se seront appliqués qu’à lire les deux pages (recto-verso) écrite par un attaché de presse qui aura récupéré tout ça sur Wikipedia. Certes ça permet de situer le Kosovo sur une carte d’Europe, mais je ne pense pas que cela soit suffisant pour décrypter les enjeux qui se jouent dans cette région.
Car ce sont ces enjeux qui sont la cause de cette indépendance. Le massacre de Racak, la soi-disant épuration ethnique sont autant de faux prétextes. Milosevic aurait été un enfant de cœur que cela n’aurait rien changé. Les raisons énergétiques, géostratégiques, économiques, le « realpolitik » si cher à Kouchner a poussé à la guerre contre la Serbie. Une guerre atroce avec utilisation de bombes radioactives. Le constat est sans appel aujourd’hui : une augmentation des cancers chez les enfants de 200% dans certaines zones serbes touchées du Kosovo. Un vieux monsieur serbe me disait un jour « Dieu, la morale a abandonné le Kosovo ». Je rajouterais que la justice et la dignité humaine aussi.
Comment peut-on laisser des moines, gardiens d’une tradition vieille d’un millénaire, vivre entre des barbelés à Visoki Decani ? Où est la justice lorsque le jeune Nikola Bozovic reçoit un coup de couteau qui le pénètre de 10 cm et que ses deux agresseurs albanais sont relâchés au bout de 48h ? Qui se soucie du sort des enfants des enclaves qui étudient dans des conditions déplorables ? Parlera-t-on du sort des Serbes du Kosovo sous un autre angle que celui de la culpabilité, la culpabilité d’appartenir à un peuple que l’on diabolise depuis bientôt 20 ans ? Il est consternant de voir que toutes ces questions sont au mieux censurées, au pire retournées et transformées pour que la victime devienne coupable. Coupable de recevoir un coup de couteau parce que Serbe, coupable d’être enclavé dans un monastère parce qu’Orthodoxe.
Dans leurs conclusions stéréotypées, les journalistes nous expliquent que le Kosovo pourrait être stable si ces salauds de Serbes (Racak, Srebrenica, SS...Ah non ça c’était les Albanais d’en face, chuttt ! on en parle pas) voulaient bien s’intégrer à la république Kosova. Finalement, à les croire, le problème du Kosovo ce n’est que le problème d’affreux indépendantistes serbes qui refusent l’autorité de l’état souverain kosovar. On reproche donc aux Serbes de vouloir faire aujourd’hui avec le Kosovo ce que les Albanais ont fait hier avec la Serbie. A la différence près que les Albanais du Kosovo sont une minorité vivant en Serbie et que le simple fait d’être majoritaire sur une zone géographique de ce pays (le sud Kosovo) ne leur permet pas de revendiquer un territoire indépendant : le Kosovo en entier. Surtout lorsque l’on sait que la Serbie est un pays souverain pluriséculaire qui a pris naissance au Kosovo. Mais dans un cas c’est tolérable et même souhaitable, pas dans l’autre. La messe est dite, en américain cette fois.
Cet anniversaire qui rend tellement joyeux la presse aujourd’hui ne célèbre en fait que le caprice du bébé laissé par les Turcs après leur départ des Balkans. Les Albanais du Kosovo ont obtenu des Américains ce qu’ils n’ont pu obtenir durablement avec les Nazis, les Fascistes puis les Communistes. Sur un siècle, les Albano-kosovars auront eu des alliés pour le moins hétéroclites ! La Serbie quant à elle a eu un allié d’importance à qui elle a toujours été fidèle : la France. Erreur stratégique serbe ou stupidité politique des Français, les dirigeants français ont favorisé, soutenu puis reconnu l’indépendance du Kosovo. C’est un peu l’histoire du mari qui trompe sa femme avec une putain…
Pour ma part je ne cautionne pas ce genre de pratique. Alors ce soir, tandis que certains fêteront leur victoire dans l’arrogance, j’aurai une pensée pour ces trois cents mille Serbes chassés de leur foyer depuis 1999 et qui vivent aujourd’hui encore dans des camps de réfugiés insalubres. J’émettrai l’espoir que les cent mille derniers Serbes du Kosovo Métochie puissent de nouveau, un jour, vivre sur leur terre selon leur identité. J’ai bon espoir que cela se réalise. Depuis 7 siècles la flamme de la résistance serbe brille sur les plaines du Kosovo Métochie, et je ne crois pas que quelques gouttes de Coca ou le souffle d’un muezzin ne l’éteigne de si tôt !
Arnaud Borella, Président de Solidarité Kosovo