HARKIS la fusion ratée !

, par  MORA , popularité : 9%

Nous vous proposons, à l’occasion des commémorations à la mémoire des harkis, le 25 septembre 2008, une relecture commentée de quelques documents, recueillis çà et là sur le Net et par les dossiers de Mr Raymond CLOAREC, voir aussi dans l’encyclopédie de l’AFN.

Ces populations, véritables pont-culturel et humain entre les communautés, sont souvent mal connues ou pas du tout. Leur rôle a été souvent incompris et mal interprété.

A l’instar des acteurs muets des grandes causes, ils ne s’embarrassaient pas de discours, leur discours c’était les actes !

Actes d’adhésion, actes de protection, actes de sympathie, actes de connivence constructive ! Bref des vrais acteurs historiques qui n’ont jamais reçu leurs cachets ! Tant de ceux qu’ils voulaient voir évoluer vers d’autres choses que de ceux qui les ont accueillis puis bernés !

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Hommes de l’Algérie rurale, les harkis étaient bien souvent illettrés. Ils s’informaient, comme les combattants dans les djebels, en écoutant la radio.

Engagés pour défendre leur douar et leur famille, ils faisaient confiance au gouvernement de la France pour conduire l’évolution de l’Algérie vers plus de dignité, d’égalité, voire au delà...

Bref, ils avaient foi dans les déclarations du général de Gaulle :
- « Venez à la France, elle ne vous trahira pas. » (1958).
- « Le sort des Algériens appartient aux Algériens. La France assurera la liberté de leur choix. » (1959).
- « Vous avez à liquider lajorce rebelle qui veut chasser la France de l’Algérie. » (1960).
- « Qui peut croire que la France en viendrait à traiter avec les seuls insurgés ? » (1960).

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Le première HARKA est crée en novembre 1954 sous la direction de l’agha Merchi des Aït Daoud après les assassinats d’ARRIS.

« Ce sont les méthodes répressives et les injustices du FLN qui apparaissent comme les motifs principaux de l’engagement massif des harkis » reconnaît aujourd’hui l’Algérien Mohamed Harbi.

Hommes de tous âges, loyalistes, les harkis récusaient le terrorisme, les égorgements pour l’exemple, et le banditisme au travers duquel s’exprimait la révolution. Refusant de rejoindre la rébellion et de collaborer avec elle, ils se voyaient aussitôt menacés, eux-mêmes et leur famille, et de mort parfois. Mais ils ne refusaient ni l’évolution de l’Algérie, ni l’indépendance.

Partisans de l’ordre, ils venaient prendre part à la lutte pour protéger leurs familles et leur douar, plutôt que pour défendre une vision politique précise de l’Algérie.

Mais pour le FLN, la lutte contre les traîtres importait davantage que le combat contre les soldats français. « Sur dix victimes du FLN, neuf sont des musulmans » écrivait en 1961 Alain Peyrefitte.

L’existence des harkas a été officialisée le 8 février 1956 par le général Lorillot. Le Commandant supérieur prescrivait d’en former une par « quartier », à l’imitation de ce que le général Parlange avait mis en place dans les Aurès-Nementchas, autodéfenses fixes et harkas mobiles, souvent encadrées par des gendarmes ou des sous-officiers volontaires.

Ce sont ces méthodologies pratiques qui inspirent les américains qui voudraient bien éradiquer les talibans en AFGHANISTAN en utilisant ces méthodes !

Ce n’était pas l’attrait de la solde qui conduisait le harki à s’engager. En rejoignant l’armée, il abandonnait tous ses biens au FLN, maison, jardin, troupeau, qui étaient rapidement saisis ou détruits. Aussi ne dédaignait-il naturellement pas l’indemnité de 7,50 F par jour (8,25 F en 1959) versée par le budget du Secrétariat Général aux Affaires Algériennes.

En juillet 1957, l’aptitude au combat des harkas avait été testée lors d’une opération « pilote » dans l’Ouarsenis et le Dahra. Aussitôt le général Salan avait demandé quinze harkas supplémentaires.

Capables de pourchasser vigoureusement l’adversaire aussi bien que de défendre leurs familles, les harkis constituaient également une irremplaçable source de renseignements. En 1960, 60 % des opérations étaient déclenchées sur leurs informations.

Combien de fois des unités régulières tombées en embuscade n’ont retrouvé leurs agresseurs et récupéré l’armement perdu que grâce à l’engagement des harkis.

Tous les commandants en zone s’accordaient à reconnaître leurs services rendus. Les généraux Challe et Crépin soulignaient également leurs qualités : rusticité, connaissance de l’adversaire, liens avec la population... Pisteurs, éclaireurs, interprètes, combattants des harkas opérationnelles ou des commandos de chasse équipés du même armement que les unités régulières, ils marchaient bien souvent en tête. Ainsi 3.250 d’entre eux ont trouvé la mort dans les accrochages.

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En 1957, néanmoins, les effectifs pourront passer de 4 à 16.000 et seront même portés à près de 30.000 le 4 août 1958. A ce moment, les moghaznis dans les SAS sont déjà plus de 16.000. Par la suite, les succès militaires vont faciliter le développement des harkas. En décembre 1958, le général Challe obtient du général de Gaulle de faire passer à 60.000 l’effectif des harkis. A partir de 1959, on retrouve 7.500 d’entre- eux au sein des commandos de chasse des secteurs opérationnels.

A ce sujet, certains de nos lecteurs pourraient nous en dire plus... beaucoup plus !!

A début de l’année 1961, la présence des musulmans dans les unités de l’armée française atteint un maximum. 61.600 harkis combattent dans six cents harkas, 62.000 gardes sont en place dans les autodéfenses, 30.000 armes leur ont été données, 19.000 moghaznis assurent la sécurité de 740 SAS, 8.000 gardes servent dans 101 GMS, 2.200 gardiens aassès complètent le dispositif, qui seront 3.600 en juin.

Les harkis sont maintenant dans les brigades de gendarmerie, dans les régiments des réserves générales... Avec les engagés et les appelés dans les régiments réguliers, les musulmans étaient alors quatre fois plus nombreux du côté de la France que de celui du FLN. Leur concours était considérable - ce qui semble avoir échappé à de nombreux français.

Certains ont avancé que les harkis jouaient le double jeu. Hormis lors de certaines périodes de troubles, comme les incertitudes en 1956, la libération des prisonniers FLN en 1960 et 1961, ou la trêve unilatérale, cela paraît bien peu probable.

Les vengeances sauvages de l’été 1962 devraient conduire à penser tout autrement. On peut d’ailleurs discerner chez les supplétifs trois périodes.
- Celle de la prudence, jusqu’en 1958,
- celle de la confiance, avant l’arrivée du général de Gaulle, et ses premières déclarations,
- puis celle des inquiétudes et de la démoralisation à partir de l’été 1961.

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Le 19 mars est alors pour eux un jour de profonde détresse. Les accords signés à Evian ne comportent pas de réelles garanties. L’armée se retire, l’ALN reste intacte et garde ses armes, c’est « la grande victoire du peuple Algérien ». La France a perdu tout prestige. Et la population adhère maintenant avec enthousiasme aux nouvelles consignes et aux mots d’ordre. Les harkis, désemparés, rentrent chez eux et tentent de se faire oublier. Les prisonniers, anciens de l’ALN, sont libres. Dans le bled commencent les enlèvements et les exécutions. En se livrant, les harkis (peut-être) sauveront-ils au moins les leurs.


La plan de rapatriement de l’Armée reposait sur l’organisation de l’accueil en métropole. Le 26 mai, le ministre des Armées ouvre le camp du Larzac (puis celui de Bourg Lastic le 29 juin). L’armée assure aussitôt avec diligence la constitution et l’encadrement des détachements, l’équipement et le fonctionnement des camps.

Ainsi, les embarquements pour la France peuvent commencer le 12 juin, soit trois mois après le cessez-le-feu et le désarmement. Près de 12.000 personnes, anciens supplétifs et familles, vont être accueillies dans les camps militaires jusqu’au 23 juillet, date à laquelle les transferts seront arrêtés par le Ministre d’Etat à la demande du Ministre des Armées.

Il est malaisé de maintenir « l’effort considérable » demandé aux armées. Les deux camps se trouvent en limite de leurs capacités d’accueil. Malgré les demandes répétées du commandant supérieur en Algérie, les rapatriements ne seront à nouveau autorisés que le 19 septembre, à la suite d’une intervention du Premier Ministre.

Sur place en Algérie, le commandant supérieur a fait savoir depuis le 24 août que le gouvernement n’est plus en mesure d’absorber en France d’anciens supplétifs (à qui il n’est pas possible de donner du travail et qui semblent « inadaptables »). Aussi donne-t-il pour directive de ne pas donner asile, ni surtout de ne plus procéder à des opérations de recherches dans les douars !

L’incertitude demeure par contre, quant aux harkis qui ont été mis à mort, parfois dans d’indicibles souffrances, au cours de l’été de 1962.

Dans Le Monde du 13 novembre 1962, Jean Lacouture avançait le chiffre de 10.000. Mais le même indiquait 100.000 morts dans le Télérama du 13 septembre 1991.

Le contrôleur général de Saint Salvy, faisant une péréquation à partir de l’arrondissement d’Akbou, avancera le chiffre de 150.000 morts. Les démographes, qui retiennent le chiffre maximum de 300.000 morts Algériens pendant la guerre, nous conduisent à penser que le chiffre de 150.000 proposé par Monsieur de Saint Salvy est sans doute excessif.

Si l’on retranche les morts du FLN pendant toute la guerre, les victimes du terrorisme et les Français musulmans morts au combat, il semble que le nombre de ceux du « parti de la France » massacrés après le cessez-le-feu devrait plus vraisemblablement se situer autour de 60 ou 70.000. Toute évaluation précise est cependant impossible aujourd’hui.

Alors... les responsabilités s’établissent peut-être plus clairement si l’on considère ces deux déclarations. L’une du général de Gaulle, devant le comité des Affaires Algériennes du 3 avril 1962 : « faut se débarrasser sans délai des auxiliaires, ce magma qui n’a servi à rien. ».

et

Le général Ailleret, commandant en chef au début de 1962, savait lui aussi que « ces forces supplétives, extrêmement utiles dans les opérations... auraient à subir le contre-coup d’une haine féroce ».

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Pourront-ils reposer en paix ?

à nos amis les harkis, la Rédaction....

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