Actualité : AAA de la France et recapitalisation des banques

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On m’interroge sur le fait que tout d’un coup on parle d’agences de notation et du triple A de la France.

On me demande aussi pourquoi l’État va encore donner du fric aux banques pour les sauver alors qu’elles annoncent toujours des profits.

Je donne ici mon point de vue qu’on peut bien sûr, ne pas partager.

 

 

Les agences de notations

Qu’entend-on par note AAA  ?

A quoi riment ces agences de notation  ?

Pourquoi les agences de notations s’occupent de la France  ?

Etc.

 

Quand on a des économies on aime bien les voir fructifier. Si on veut éviter les aléas de la bourse on peut s’orienter vers des placements sensés être moins risqués, par exemple :

a    Les livrets d’épargne qui sont couverts par la garantie bancaire sont sûrs mais ne rapporte que des clopinettes

b    Les emprunts d’État rapportent plus mais s’ils ne sont pas en euros (exemple des emprunts américains qui sont en dollars) ils présentent un risque de change  : lorsqu’il sont remboursés, la parité avec l’euro pouvant avoir changée, le montant remboursé peut être supérieur ou inférieur au montant initial.

c    Les obligations d’entreprises qui empruntent pour financer leurs investissements ou pour combler des pertes.

d    Les emprunts des banques qui ont besoin de liquidités pour financer l’économie

 

Mais ces placements ne sont pas tous sûrs et le risque associé avec tel ou tel placement n’est pas facile à évaluer.

(a)   les livrets sont très sûrs car ils bénéficient d’une assurance qui garantit les dépôts bancaires jusqu’à concurrence de 100 000 € par déposant.

(b)   Les États étaient réputés solides mais la crise a montré que la faillite d’un État n’est plus un cas théorique. Et les organismes gouvernementaux autonomes (établissements publics, collectivités régionales et locales, etc.) qui empruntent également, ne sont pas à l’abri d’un dépôt de bilan.

(c)    Les emprunts des entreprises grandes et petites, nationales et internationales, représentent des risques extrêmement divers qui dépendent de nombreux facteurs dont notamment la solidité actuelle de l’emprunteur, sa viabilité à terme et l’usage fait des fonds ainsi recueillis.

(d)   Les banques représentent un risque direct très faible mais la solidité d’une banque dépend des risques induits par ses propres placements dans les catégories (b) et (c) ci-dessus.

Dans ce contexte, comme je ne suis pas en mesure d’évaluer tous ces risques et comme j’ai moins de 100 000 € les livrets sont pour moi tout indiqués.

 

Cependant, l’économie a besoin de beaucoup plus de fonds que ce que mes congénères et moi-même pouvant apporter et des investisseurs importants (banques, compagnies d’assurances, fonds communs de placement notamment) doivent trouver des placements intéressants et peu risqués.

 

Lorsqu’un emprunteur présente un risque très faible voire inexistant, il propose d’emprunter à un taux très bas. Les investisseurs qui veulent dormir plus tranquille reçoivent ainsi un intérêt ridiculement bas. Si un investisseur est plus gourmand, il peut choisir un placement qui rapporte plus d’intérêts mais avec un risque accru de ne pas retrouver son capital au final.

 

D’accord, mais les emprunteurs voudraient tous emprunter à un taux d’intérêt ridiculement bas. Alors s’il n’y a pas de contrôle par une entité indépendante, comment l’investisseur peut-il savoir si l’emprunteur qui annonce un taux très bas le fait parce que cet emprunt est solide et le restera  ?

 

Le travail des agences de notation c’est d’évaluer la situation présente et à venir de tous les emprunteurs afin d’éclairer les prêteurs sur les choix qui s’offrent à eux et les risques qu’ils encourent.

 

Les agences de notation ne s’intéressent pas particulièrement à la France. Comme la France est un très gros emprunteur (la dette de la France approche les 2 000 milliards d’euros  !) les agences tentent d’éclairer les prêteurs sur le risque qu’ils encourent s’ils lui prêtent leur argent.

 

Selon l’opinion des agences de notation, les emprunteurs sont contraints d’emprunter avec des taux d’intérêts dans des fourchettes raisonnables et comparables à celles des autres emprunteurs de leur catégorie et d’offrir des maturités raisonnables (date à laquelle l’emprunteur s’engage à rembourser le prêt).

 

Les agences de notation ont donc un rôle utile car sans leur évaluation, les prêteurs seraient bien plus réticents. Ce qui n’empêche que, comme toute entreprise elles ne sont pas à l’abri d’erreurs matérielles ou d’interprétations erronées. Sans boule de crystal, elles ont souvent raté un changement insidieux ou une fraude (ex. la fragilité des banques liée aux subprimes, la faillite d’Enron, celle de Lehman Brother, ou encore la sincérité des comptes de l’État grec, par exemple).

 

Cependant, comme il y a 3 agences de réputation internationale (Moody’s – Standard & Poors – Fitch) ce risque est atténué.

 

Le cas de la France est intéressant car il présente une particularité qui peut faire douter de l’honnêteté des agences. La France est notée AAA, note accordée aux emprunteurs les plus solide. C’est également le cas de l’Allemagne. Par contre, alors que l’Allemagne jouit d’une capacité d’emprunt AAA qui lui permet de servir un taux d’intérêt de seulement 1,7%, la France ne trouve des prêteurs que pour un taux d’intérêt de 3,5%.

Les investisseurs contrairement aux agences de notation considèrent donc que la France n’est pas un risque AAA comme l’Allemagne. Qui se trompe  ?  (voir également  Ségolène va nous sortir de là ! )

 

 

Les fonds propres des  banques

La recapitalisation des banque c’est quoi, pourquoi  ?

Les fonds propres des banques passeront à 9%  !

 

Les banques prêtent notre argent à des emprunteurs qu’elles choisissent librement sans nous demander notre avis. Souvent les gens et les entreprises se plaignent quand les banques —jugeant que l’emprunteur en question ne présente pas de garanties suffisantes— ne veulent pas leur fournir les fonds qu’ils demandent. Les banques ne prêtent que lorsqu’il est raisonnable d’estimer que l’emprunt sera remboursé comme prévu dans le contrat de prêt.

Et c’est très bien ainsi  !

Les banques ne font pas ce qu’elles veulent, il s’agit d’une profession réglementée et, comme les banques prêtent notre argent, le législateur a prévu des gardes fous pour éviter que le déposant n’apprenne un jour que son argent est parti en fumée.

 

D’abord il y a le fond de garanti que les banques alimentent pour permettre de rembourser les déposants lorsque l’une d’entre elles fait faillite.

 

Mais le risque le plus probable c’est que des gros prêts de ma banque ne soient pas remboursés suite à la faillite des entreprises bénéficiaires de ces prêts.

Dans ce cas, si la banque a prêté mon argent que se passe-t-il pour moi  ?

Heureusement, mes dépôts sont protégés par ce qu’on appelle les ratios de solvabilité de la banque.

La banque doit à tout moment disposer de fonds propres (son propre argent) suffisants pour pouvoir assumer elle-même les pertes induites par les prêts qu’elle a consenti et qui ont mal tournés. En aucun cas, ces prêts non remboursés ne doivent amener la banque à m’imputer une partie de la perte.

 

Pour ce faire le législateur exige que la banque limite le total des sommes prêtées à tous ses clients emprunteurs. Comme il n’est pas raisonnable de penser que tous les emprunteurs feront défaut, il n’est pas utile de demander à la banque de couvrir 100% des prêts. En outre, si pour être 100% sure la banque ne pouvait plus prêter l’argent déposé/prêté par ses clients, elle n’aurait pas les moyens de répondre aux besoins des emprunteurs solvables (le particulier qui emprunte pour un achat immobilier, l’entreprise qui emprunte pour investir, ou la PME qui a un besoin de trésorerie passager par exemple) et l’économie nationale serait paralysée.

Un autre facteur intervient, c’est la nature même du patrimoine de la banque qui garantit les prêts. Il y a les fonds propres qui sont les plus tangibles qu’on appelle Tier 1 ou fonds propres durs et il y a le reste dont le montant est susceptible de varier avec le temps et l’économie (par analogie, j’ai des dépôts bancaires qui correspondent à des sommes intangibles mais j’ai aussi des actions ou de l’immobilier dont la valeur varie avec le temps).

 

La réglementation bancaire exige que les fonds propres durs de la banque représentent 7% de tous ses encours de crédit ce qui signifie qu’une banque qui prête 100 milliards doit posséder en propre 7 milliards de fonds propres durs. Le régulateur a estimé que, tant que les pertes ne représenteraient qu’une part faible des crédits accordés (typiquement de 0 à 3% selon la banque et le type de crédit), la banque qui maintient ses fonds propres durs à ce niveau pourra seule assumer toutes les pertes, l’argent des clients est donc protégé.

 

Mais Merkozy a décidé que ce montant de fonds propres durs devait passer à 9% à cause de la crise grecque.

 

Que signifie ce changement  ?

La cause historique de cette volonté de changement vient de la situation en Grèce et ce changement entraînera deux conséquences immédiates  : d’abord moins de crédit pour alimenter l’économie française et ensuite une recapitalisation forcée des banques pour permettre à nouveau des crédits.

 

Impact de la crise grecque.

Pour éviter la faillite de la Grèce Merkozy a demandé aux banques de faire une croix immédiate sur la moitié des sommes empruntées par l’État grec. Cette perte est hors norme, le système prévoyait que l’activité des banques présente un risque de perte sur crédit pouvant aller jusqu’à 3% mais là, sur un seul débiteur –la Grèce—, on risque de dépasser cette limite. Les banques qui doivent donc enregistrer cette perte importante voient leurs fonds propres baisser d’autant. Pour respecter la réglementation cette perte oblige les banques à réduire de manière considérable les prêts consentis à l’économie.

 

Exemple concret  :

Une grande banque française qui pèse 70 milliards de fonds propres durs est autorisée à prêter jusqu’à 1 000 (règle des 7%). En supposant qu’elle a consenti 4 milliards de prêts à la Grèce (soit seulement 0,4% de tous ses crédits), elle enregistre une perte de 2 milliards quand elle abandonne 50% de cette dette. Le résultat c’est que ses fonds propres durs passent de 70 à 68 milliards et, pour respecter la règle des 7%, elle doit maintenant ramener ses prêts à 971 milliards.

Donc cette perte de 2 milliards l’oblige à réduire ses crédits de 29 milliards.

Comme la banque ne peut pas remettre en cause les crédits déjà accordés, elle refuse d’accorder des nouveaux crédits à des emprunteurs qu’elle aurait volontiers suivis en d’autres circonstances.

 

Avec le passage des fonds propres durs de 7% à 9%, la banque qui pèse 70 milliards ne peut prêter que 778 milliards et non plus 1 000. La perte grecque ramène ce montant à 755 milliards.

La perte grecque associée au renforcement des fonds propres durs oblige donc cette banque à ramener ses crédits de 1 000 à 755 soit une réduction de 24%. Autant dire qu’elle ne pourra plus prêter pendant des lustres  !

 

Certes les banques qui accordent moins de crédits voient leur activité réduite d’autant mais c’est surtout es autres agents économiques qui se trouvent ainsi étranglés par l’assèchement des crédits bancaires.

Ce qui explique le discours des politiques sur la recapitalisation des banques.

Comme indiqué dans mon analyse précédente ( voir L’État a-t-il vraiment secouru les banques en 2008 ? ) il ne s’agit pas de secourir les banques mais de permettre aux banques de continuer à consentir des crédits afin que l’économie ne soit pas paralysée.

Cette augmentation de capital nécessaire pour maintenir les possibilités de crédit de la banque peut s’effectuer de 3 manières  :

(i)                  En réduisant ou supprimant le dividende normalement versé à l’actionnaire pour que les bénéfices s’ajoutent aux fonds propres

(ii)           En demandant à l’actionnaire de mettre au pot pour une augmentation de capital de la banque ou

(iii)          Comme en 2008 en permettant à l’État de fournie des liquidités. Comme l’État est fauché, cette dernière option consiste à emprunter aux banques la somme en question (à 3,5% environ) pour renforcer ensuite les fonds propres de la banque par des titres subordonnés assortis d’une rémunération de 8%. On peut comprendre la réticence des banques qui préfèrent les deux autres options.

 

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Voir en ligne : http://blog.francetv.fr/blogistan-a...

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