Une lettre de Jean-Paul BANON à ses parents

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Le Guelta décembre 1956 ( Jean-Paul BANON)
(Jean-Paul sera assassiné les 30 mars 1961)

Mon cher Papa, ma chère Maman,
Nous avons bien reçu vos lettres et nous vous donnons les détails demandés. : la veille de la fameuse nuit Atman ,sur Ie coup de 10 heures du soir ,avait vu une lampe électrique s’allumer du cote du jardin et fouiller a hauteur du hangar entre Ie hangar et l’écurie ; Le lendemain il en faisait part à Georges qui, après avoir vu Ie capitaine ,ce dernier lui a dit d’aller voir I’adjudant qui était chargé de faire une patrouille dans notre secteur. L’adjudant confirmait à Georges les faits et lui disait qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. Sur quoi Georges prévenait Atman et lui rendait courage. Le mardi soir Atman restait avec Georges jusqu’a 19 heures devant l’écurie : après quoi Georges descendait chez lui et Atman montait directement dans la pièce. Vers 8H 30 ,Atman entendant les chiens d’Ahmed aboyer ouvrait la fenêtre du milieu et perché sur mon lit regardait . II vit entrer en file indienne une trentaine de militaires qui vinrent directement jusque devant la petite fenêtre de son gourbi (à ce moment les derniers , dit-il étaient devant la porte du magasin à outils).une fois là, Ia tête de file ordonnait à un type d’appeler . Ce dernier volontairement contrefaisant sa voix ,appelait Atman. Ce que voyant Ie chef l’insultait et lui disait « tu es bien du pays, cependant gueule plus fort et mène nous y. L ’autre passait par Ie lavoir et suivi de 4 militaires entrait sans la moindre hésitation chez Atman où il se trouva face a Kheira , la femme de Dakka. II lui demandaient où était Atman ? cette dernière disant qu’elle ne savait rien les militaires fouillèrent Ie gourbi et réveillèrent les gosses. Ne trouvant pas Atman ils retournèrent voir Kheira et lui demandaient les clefs du « bureau » et les fusils (Ie lundi Kheira (femme d’ Atman) et ses 2 fils Moha et Ahmed étaient partis chez Bokara par Ie car pour voir Halima) Kheira leur répondit qu’elle n’en savait rien ,qu’ Atman les avait emportés avec lui et qu’il était chez Bokara avec sa femme. Les types après avoir fouillé toutes les caisses et les paillasses sortirent de là et rejoignirent les autres , qui pendant ce temps avaient forcé la porte du magasin a outils ,sorti une pioche hache a I’aide de laquelle ils percèrent une pipe de 200 Iitres de gazoil et commencèrent d’en repartir sur Ie hangar ,dans la maison, sur la forge ,enfin de tous cotés. A ce moment Ie chef criait bien fort a tout Ie monde de se rassembler et de Ie suivre .lIs lancèrent 8 bouteilles Molotov un peu dans tous les coins et passant en groupe par Ie lavoir ils descendirent droit a l’ouest vers I’oued .Rencontrant Ie grillage et les barbelés ,tel une marée ,i1s couchèrent 3 poteaux et poursuivirent leur poussée et tombèrent a I’oued, a hauteur du gros olivier tombant d’une hauteur de 3 mètres environs, au milieu des « guedoubs » et autres. A cet endroit Ie lendemain Ie chef de gendarmerie et Atman trouvèrent des bouchons de grenade 3 fusils que dans leur chute les types avaient fait tomber. Quand les flammes jaillirent ,Ia fusillade éclata de toutes parts et Atman , toujours à sa fenêtre vit arriver I’Haftrack jusqu’a hauteur de la cave Coopérative d’ou il lâcha une rafale de mitrailleuse , dont une balle frappait a I mètre de la fenêtre dans les rangées de briques a 9 trous , traversa cette dernière puis la tôle pour s ’envoler .. Atman que je crois sincère se dit s’être laissé prendre au dépourvu . II s’est aperçu que c’était des fellaghas quand les types ont appelé et a ce moment devant leur nombre et prévoyant sans doute Ie sort qui était réservé a ses gosses iI a attendu , Ie fusil dans les mains que les types commencent leur carnage en bas ou essayent de monter jusqu ’a lui. Entre temps , j’ai oublie de Ie mentionner, quelques types ayant sorti de la maison Ie gros couteau de cuisine se sont dirigés vers la maison du haut dans I’intention de faire un mauvais sort a Bouarita : mais devant les supplications d’un type que Atman croit être celui qui avait été chargé de I’appeler au début de I’opération, les hommes se sont contentés de Ie poser devant la porte de Bouarita. Pendant ce temps (Fatma était partie à Mazouna) les filles et fils de Bouarita entendant Ie type supplier, croyaient entendre Atman , qui , pris par les fellaghas, implorait pardon. Enfin, ils ont du avoir très chaud. Et ce qu’i a manque a Atman était un peu de courage : il en était paralysé et si nous avions été là il aurait tiré avec nous . En passant a Orléansville j’ai vu Mr Briones qui très aimable m’a charge de beaucoup de choses pour toi et m’a fait avoir un bon de 500g de poudre , 2 kg de chevrotine , 200 douilles , des bourres, et 2 boites de cartouche 7.65 .Ajoute à ça 150 gr de poudre de borate , 100 cartouches, 40 balles et l kg de chevrotine on est paré. La gendarmerie m’a demandé un inventaire de ce qui avait brûlé que je leur ai remis avec la mention « Ie tout sauf erreur ou omission d’une valeur approximative de 8.000.000 de francs. Du coup on renforce tout Ie tour de la pièce intérieurement d’une hauteur d’ 1 mètre environ ,d’un grillage noyé dans 10 cm de mortier, on ne sait jamais. En plus de ça on a percé un trou entre la maison et la cuve d ’orge ce qui nous permet de monter dans la pièce. sans sortir .. ]’ai vendu la vieille paire de bœufs 88000 francs

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