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, par  Allezou...bIda ✞ , popularité : 41%

Historia d’octobre 2009

COLONISATION : Pour en finir avec la repentance

Vous pensez bien qu’à lire un tel titre, je me précipite chez le buraliste pour acquérir ce magazine, enfin l’histoire telle que je l’ai vécue et que mes ancêtres me l’ont racontée, il était trop tard les invendus avaient été retournés. Qu’importe, avec internet plus rien d’impossible de nos jours : le site "Historia", commande de numéros archivés, et 3 semaines plus tard, enfin MON HISTOIRE...

L’aventure coloniale s’inscrit dans une nouvelle ère des Lumières. Il s’agit de "répandre ce qu’il y a de meilleur dans notre effort scientifique, dans notre idéal rationaliste et démocratique". Victor Hugo y adhère.

Alors si cet homme qui m’a tant apporté voit du positif dans cette aventure, rien n’est perdu.

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Daniel Lefeuvre
 : Une mission de civilisation[/fuchia]

La colonisation s’est accompagnée, pour les indigènes, de conséquences qu’on pourrait qualifier de positives au risque de s’attirer les foudres indignées des vertueux censeurs.

Pourtant passée la violence des conquêtes, inégales d’une contrée à l’autre, la colonisation a mis un terme aux guerres et révoltes internes qui ravageaient les pays, elle a apporté une sécurité de la vie quotidienne, elle a supprimé certaines coutumes barbares des contrées africaines : cannibalisme et sacrifices humains.

La colonisation est fille de 1789 et de la déclaration des droits de l’homme, ainsi que de la politique industrielle et elle apporte les idéaux de la France au-delà des frontières. Elle développe les infrastructures routières, ferrovières, portuaires, aéro-portuaires "certes pour ses propres intérêts" mais elle introduit aussi de nouvelles cultures et l’amorce d’un industrialisation qui firent prendre un essor à ces contrées, bien au-delà de la période coloniale.

Cette mission peut se résumer en 3 verbes : LIBERER, EDUQUER, SOIGNER.

Bien qu’ayant contribué à la traite négrière, l’homme blanc a été un outil de libération : en juillet 1830, les juifs sont libérés de la dhimmitude et faits pleinement citoyens français par le décret Crémieux du 24 octobre 1870. Les puissance européennes s’engagent dans une croisade contre le trafic du "bois d’ébène" et contre l’esclavage qui était une pratique courante dans la régence d’Alger. Ce ne fut pas sans mal car

nous avons affaire à une population musulmane qui regarde la possession des esclaves comme un droit et qui, de longtemps, ne pourra considérer comme des crimes les actes relatifs à la vente ou à l’achat de ces malheureux

Au nom du principe du libre arbitre et de la devise républicaine "Liberté, Egalité, Fraternité", l’occupant éradiquera cette tradition mais non sans ambiguïté car pour sauvegarder la paix civile, il est soumis à des compromissions au cours de la guerre d’Afrique : la tradition du partage des prisonniers entre les tirailleurs fut maintenue, ce butin constituant une grande partie de la solde de la troupe.

Le méchant colon pointe tout de même le bout de son nez :

Au nom de ce progrès apporté aux population colonisées, il étend les pratiques locales développant le travail forcé pour le portage, les chantiers de chemin de fer ou le développement de nouvelles cultures, créant ainsi de nouvelles sujétions humiliantes.

J’aurais aimé que l’auteur aborde les conditions des travail des ouvriers métropolitains afin que nous ayons une échelle de comparaison.

A l’abri, dans leurs bureaux feutrés , les différents gouvernements poursuivent, avec ténacité cette oeuvre libératrice aidé en cela par les missionnaires, une grande figure ressort de cette époque : le Cardinal de Lavigerie, Archevèque d’Alger. Les pères et les soeurs blancs se font instituteurs et médecins. Charles De Gaule rappelle le rôle salvateur de cette mission dans son discours de Brazzaville, le 2 février 1944.

Comme le fait remarquer Marc Michel dans "Essais sur la colonisation positive" :

"Malgré les abus et injustice qui l’ont accompagnée, la colonisation ne mérite pas le procès qui lui ai fait... Il nous parait tout aussi inepte de jauger la colonisation à l’aune de ses bienfaits qu’à celle de ses méfaits... L’installation coloniale... est à l’évidence un acte violent... elle n’est pas que cela. Il va sans dire qu’il y eut des deux, du bien et du mal"

Pour conclure Daniel Lefeuvre met en garde les historiens d’oublier l’un de ces aspects

et c’est au nom des valeurs portées par la France, que les leaders nationalistes ont justifié et légitimé leur combat à l’heure des indépendances

Nous avons donc fait germer dans les esprits des colonisés cette étincelle de révolte qui a fait que nous nous sommes retrouvés les victimes de nos bons sentiments.
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Amaury Lorin  : La route est toute tracée[/fuchia]

Dénoncée comme une entrave au développement des échanges internationaux par les libéraux, les marxistes voient dans la colonisation une forme d’exploitation du colonisé et à ce titre le développement des infrastructures a eu un double intérêt : rapprochement des colonies de la Métropole et par souci politique souder et relier les diverses parties de l’Empire. Ces infrastructures, censées adoucir le sort des indigènes, les subjuguent pour mieux les soumettre.

L’objectif est également économique : ces travaux ouvrent des débouchés à l’industrie métropolitaine : les mines sont exploitées ; les plantations développées et de la main d’oeuvre indigène embauchée ; ainsi les intérêts convergent : aménagements coloniaux au profit des des populations locales et des épargnants métropolitaines :

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alors que cette immense entreprise se réalise par l’exploitation d’une main d’oeuvre indigène assujettie contre son gré, arracher par milliers à leur champs et leurs villages.

Conclusion de l’auteur :

Cuisant échec du projet civilisateur d’origine, sur fond de modernité devenu symbole de l’arbitraire colonial

Encore une fois, il découle de cette analyse, que les colons ont fait, d’une démarche altruiste et salvatrice, une oeuvre de rapine et de profit ne tenant aucun compte des intérêts et besoins des "malheureux colonisés".

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Laurence Monnais :
Les toubibs font merveille[/fuchia]

Dans les années 1870, 26% des officiers sont fauchés par la maladie, 16% meurent au combat, pour inverser le processus, on identifie la majorité des micro-organismes responsables des maladies on les met en germe permettant ainsi de découvrir des vaccins immunisants.

La médecine s’érige en outil d’impérialisme incontournable et le médecin est investi d’un mission bicéphale : politique (supériorité occidentale et d’abord française) économique (accroître et fortifier la main d’oeuvre indigène) et humanitaire -le terme est employé- qui consiste à exporter le progrès hygiénique pour en faire bénéficier les populations sous tutelle

La France insistera sur la dimensions civilisatrice et assimilatrice de cette entreprise. Le médecin protège les troupes et les colons et profite de cette situation géographique pour engranger des connaissances pathologiques, botaniques et cartographiques qui serviront à faire évoluer la science au profit de l’humanité.

Ainsi trouve-t-on Albert Calmette qui, à Saïgon, développe, grâce à de nombreuses études, les vaccins anti-rabique et anti-variolique, Alexandre Yessin, découvreur du bacille de la peste, s’installe à Nha Trang pour en faire le haut lieu de la production de vaccins et sérums vétérinaires, Alphonse Laveran découvre, à Constantine, le plasmodium, agent du Paludisme, ce qui lui vaut le prix Nobel de physiologie et de médecine en 1907, Eugène Jamot, en poste à Brazzaville fait face à un épidémie de trypanasomiase et arrive à éradiquer cette maladie ce qui lui vaut le prix Nobel de médecine, Charles Nicolle reçu le même prix pour ses recherches sur le typhus en 1928. Ces médecins, soutenus par un réseau de 14 Instituts Pasteur d’Outre-Mer (I.O.P.M.), font avancer la médecine (au profit des seuls occidentaux ?) ; les colonies étant devenues un vaste laboratoire d’observation et d’expérimentation sur les maladies tropicales, elles attirent des scientifiques de tous les pays.

En quoi cette effervescence médicale profite-t-elle aux colonisés, que dire de l’exercice de ce devoir humanitaire ? On vaccine, on rend l’eau potable, on dératise, on construit des hôpitaux mais les budgets sanitaires sont anémiques. Une loi est votée en avril 1909 déclarant que les colonies ne doivent rien coûter à la France et devront s’autofinancer, ainsi voit-on le "Bon docteur Schweitzer" donner des concerts d’orgue et écrire un livre sur Jean-Sébastien Bach afin de financer les soins dans l’hôpital de Lambaréné. Après le discours de Brazzaville, le budget sera augmenté de 10%. Le recrutement des praticiens civils ne fait pas recette, ils sont manifestement peut attirés par ce sacerdoce ingrat et mal rémunéré alors l’emploi de personnel médical indigène apparaît comme une solution ainsi que la formation d’infirmiers et de sages-femmes.

L’accent est mis sur une prévention de masse :

VACCINER, ENREGISTRER, DESINFECTER

Par contre, la prise en charge de la santé maternelle et infantile sera tardive, la tuberculose et le trachome, qui rend aveugle, continuent leur ravage.

Les contraintes imposées sont mal perçues par les populations : vaccination obligatoire, interdiction de suivre le rite funéraires, ségrégation des groupes à risques dans des quartiers confinés.

Conclusion de l’auteur :

Le bilan de la santé coloniale est alors forcément contrasté, ambigu. Entre idéalisme scientifique, exploitation et discrimination impérialiste, la frontière ne fut pas toujours traçable. En même temps, on peine à considérer avec Frantz Fanon, psychiatre Martiniquais, défenseur de la cause algérienne et icône de la pensée postcoloniale, que la médecine et le médecin symbolisaient intrinsèquement tout le tragique, l’oppression et l’humiliation de la situation coloniale


La médecine qui se voulait facteur de progrès, de bien être, de bien vivre a été le marche-pieds du colonisateur permettant aux colonisés de se bien porter pour être mieux exploitables et plus rentables. Cette analyse semble être nuancée par la conclusion donnée l’auteur, mais la pensée première est une "colonisation négative" dans le domaine médical

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Pierre Montagnon : L’instituteur s’installe en maître[/fuchia]

A Alger, en 1884 Jean Jaurès déclarait

"Nos colonies ne seront françaises d’intelligence et de coeur que quand elles comprendront un peu le français. Pour la France surtout, la langue est l’instrument de la colonisation. Il faut que les écoles françaises, où nous appellerons l’indigène, viennent au secours des colons français dans leur oeuvre difficile de conquête morale et d’assimiliation"

L’enseignement suit la colonisation et Galliéni de répéter à ses cadres :

"Chaque fois que des incidents de guerre obligent l’un de nos officiers coloniaux à agir contre un village ou un centre habité, il ne doit pas perdre de vue que son premier soin, la soumission des habitants obtenue, sera de reconstruire le village, d’y créer immédiatement un marché, d’y établir une école"

Albert Sarraut, Gouverneur d’Indochine, écrit dans une circulaire :

"Faire un peuple instruit, ami de la loi, industrieux, capable de prendre une part croissante à la questions des intérêts de son pays"

Mais les Européens d’Algérie redoutent le développement de l’enseignement chez les indigènes et y décèlent le germe d’un danger politique. Albert Sarraut persiste :

"l’instituteur ne sera pas un danger mais une force pour nous si elle aide l’indigène à mieux percevoir notre effort permanent de bien et de progrès"

appuyé en cela par Charles De Gaulle dans son discours de Brazzaville.

La religion fait obstacle à l’enseignement des "Bons Pères", les colons s’y opposent pour des raisons politiques, le rejet indigène se concentrant sur elle et sur la présence française.

En 1908, le congrès des Maires, tous européens, vote une motion extraordinaire :

Considérant que l’instruction des indigènes fait courir à l’Algérie un véritable péril, tant au point de vue économique qu’au point de vue du peuplement français, les Maires d’Algérie émettent le voeu que l’instruction primaire des indigènes soient supprimée.

ainsi au début du XXème siècle, un seul indigène, le jeune Kabyle Augustin Ibazizen, est élève dans un collège de 150 élèves de Miliana. Peu à peu cette instruction indigène devient réalité. En 1954, 400 000 garçons et 70 000 filles musulmans sont scolarisés, chiffre important mais insuffisant.

Après la première guerre mondiale, les Algériens comprenent l’intérêt que représente l’instruction des jeunes.

Le taux de scolarisation s’améliore avec la guerre d’Algérie : de nombreuses écoles seront créées dans le bled et 4000 instituteurs, dont 900 musulmans, seront formés par l’école normale de la Bouzaréah, près d’Alger.

Les époux Monnerot, instituteurs venus de Métropole, ont été les premières victimes de la Toussaint sanglante du 1er novembre 1954.

Les écoles furent des pépinières de révolutionnaires, ce au nom des idéaux républicains.

Effet boomrang, le colon fut-il le promoteur de sa défaite ? Le congrès des maires avait-il eu une vision prémonitoire de l’avenir de l’Algérie ?

En quoi est-il responsable, ce colon prédateur, si dans la tradition musulmane, les filles ne sont pas dignes d’être instruites (voir les chiffres des enfants indigènes scolarisés en 1954) et si les jeunes garçons deviennent bergers plutôt que plombiers, médecins, électriciens, instituteurs....? Pourquoi le seul élève de Miliana est un Kabyle prénommé Augustin ?

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[fuchia] Michel Vergé-Francheschi : Des dérives intolérables
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Instauration de l’esclavage, exploitation des richesses de la terre et des sous-sols, discriminations politiques entachent l’histoire de colonies. Sans oublier de terribles massacres. Une situation née avant tout d’un rapport -quasi animal- de prédation entre dominant et dominé.

Ce volet traite des première conquêtes, de l’esclavage, des migrations entraînant l’exploitation de l’homme par l’homme depuis la nuit des temps, au nom de tous les raisons : religieuses, matérielles, défensives, sans distinction de race : le Grec chassé par les Perses, s’installe en Corse, en réfugié il fonde une colonie, il a besoin d’eau, de vivres et de femmes : 3 bonnes raisons de se battre avec l’autochtone et tous deux sont blancs, tout deux, à notre époque, auraient été Européens.

Il fallut plusieurs étapes pour passer de la colonisation au racisme, du racisme à la discrimination.

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En exergue : Loi du 23 février 2005 - Article 4 :

Fallait-il retirer le terme "positif" ?

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Guy Pervillé
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"C’est une loi à caractère glorificateur comme celles qui ont créé les fêtes nationales du 11 novembre et du 8 mai et non une loi mémorielle"

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Ivan du Roy [/fuchia] :

"Si la colonisation s’est révélée positive, ce n’est pas pour les peuples dominés, mais pour l’enrichissement économique de la Métropole"

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Note du rédacteur

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Bien que nuancée, l’analyse de Daniell Lefeuvre est la seule :

- qui corresponde à un souci de "véracité" et qui justifie le sous-titre de ce magazine "Pour en finir avec la repentance" et que je ne regrette pas d’avoir lu.

-qui aborde un thème avec des arrières-pensées politiques, des idéologies orientées et donne un reflet qui n’est pas totalement exempt d’un désir de propagande.

- Plus de 47 ans après, l’histoire de l’Algérie donne encore lieux à des controverses partiales dans lesquelles le colon tient toujours le mauvais rôle.
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