Mais qui a dit que l’automne (arabe) portait à la mélancolie ?

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Cette semaine, Gilles-William Goldnadel revient sur les résultats des élections marocaines et le viol collectif de la journaliste de France 3. Les commentateurs hexagonaux sont à peine moins extatiques à l’égard des mouvements populaires arabes …

Cette semaine, Gilles-William Goldnadel revient sur les résultats des élections marocaines et le viol collectif de la journaliste de France 3.

Les commentateurs hexagonaux sont à peine moins extatiques à l’égard des mouvements populaires arabes qu’ils ne l’étaient au temps des primevères. Le parti islamiste arrivé en tête des élections marocaines est « modéré », forcément « modéré ». Curieusement, les partis démocratiques ne semblent pas très enthousiastes à gouverner en sa compagnie. Même chose, pour le parti tunisien Ennahda, inévitablement étiqueté « modéré », sauf à passer pour un anti-islamiste primaire.

Il n’est cependant pas inutile de prendre connaissance de la très intéressante interview par France-Soir (23 novembre) de l’ancien ambassadeur de la Tunisie à l’Unesco, Mezzri Haddad, qui avait démissionné pour soutenir la révolution ayant renversé Ben Ali et qui s’inquiète aujourd’hui de sa tournure  : Extraits : « Les islamistes tunisiens ne couperont pas la main aux voleurs, ils ne reviendront pas tout de suite sur le code du statut personnel qui accorde aux femmes des droits comme nulle part ailleurs dans le monde arabe. Ils ne fermeront pas non plus les hôtels, mais ils feront appel au tourisme islamique. Ils ne forceront pas les femmes à porter le voile, mais c’est la pression sociale qui les y contraindra. Ils n’aboliront pas le système de l’éducation nationale, mais ils réformeront les manuels scolaires dans le sens contraire. Ils ne changeront pas radicalement les lois civiles et pénales, mais ils travailleront à leur progressive « chariatisation ». Dans tous les domaines de la vie politique, économique, sociale et culturelle, ils procèderont par petites touches, de façon graduelle, par islamisme "modéré…" »

Aux côtés des agences de notation, je préconise donc la création d’agences d’appellation contrôlée.

Qui est « islamiste modéré » ?

Ce seraient elles, et non quelques obscurs médiacrates qui décideraient, dossier à l’appui, qui est « extrémiste de droite » ou « populiste », ou qui est « islamiste modéré ». Ainsi, peut-être, le pouvoir iranien sera-t il qualifié, non plus de « conservateur » mais « d’extrême droite » et « les faucons » cesseront de planer sans fin au-dessus de Washington et Tel-Aviv pour être enfin autorisés à survoler Gaza, Moscou et Beyrouth.

En Egypte, sur la place Tahrir, ce sont des Egyptiens, de toutes tendances, qui sont censés poursuivre le mouvement révolutionnaire. Et tant pis si des observateurs anglo-saxons moins primesautiers décrivent plutôt des salafistes un chouya plus radicaux. La rue arabe a toujours raison. Surtout lorsqu’elle est en colère.

Dans un éditorial du 23 novembre intitulé « L’heure de vérité pour les généraux égyptiens », Le Monde somme l’armée de donner des gages aux manifestants. Tout en réalisant l’exploit de ne pas évoquer une seule fois les Frères Musulmans, aux portes du pouvoir. Il est vrai que notre ministre des affaires étrangères les considère, chaque jour un peu plus, comme « modérés ».

L’hypothèse d’une chute de la junte inquiète pourtant un grand nombre d’Egyptiens. De nombreux analystes politiques cairotes répètent à peu près le même discours : l’armée est la dernière institution nationale intacte : « la place Tahrir est insatiable », observe Hicham Kassem, célèbre journaliste libéral égyptien. (le Figaro du 23 novembre).

Viol collectif

Mais c’est ainsi, l’Occident est sans pitié pour les régimes autoritaires d’Orient, sauf lorsqu’ils sont impitoyablement contre lui. Le viol collectif, pendant trois quarts d’heure, qu’a subi Caroline Sinz, envoyée de FR3 au Caire, n’avait pourtant rien de gentillet. Le public français s’imagine sans doute qu’il constitue un cas exceptionnel. En réalité, ce n’est que le dernier d’une série qui a commencé à la belle saison par l’agression sexuelle d’une jeune journaliste américaine, que ses violeurs ont eu tôt fait de présenter pour une espionne.

Rares, très rares furent ses confrères français à compatir à son sort. Peu d’intérêt non plus pour les milliers de commentaires négatifs et les menaces de mort qu’a récoltés Aliaa Magda Elmahdi, cette jeune et authentique rebelle égyptienne qui a osé poster sur son blog des photos d’elle, nue, afin de promouvoir l’égalité des genres et la liberté d’expression en Egypte (le New York Times du 25 novembre).

Sur CNN, Aliaa déclare : « La plupart des Egyptiens font mystère de la sexualité parce qu’ils sont élevés dans l’idée que c’est mal et dégoûtant. Le sujet n’est pas abordé en cours. Pour la majorité d’entre eux, cela se résume à se servir d’une femme. »

De manière générale, il convient de constater que les féministes occidentales encartées semblent toujours plus promptes à accabler le bon vieux hétérosexuel d’ici, chargé de tous les maux, plutôt que de s’en prendre à ceux qui se proposent d’asservir encore plus cruellement leurs sœurs là-bas. On ne peut pas tout faire non plus. Ni tout dire.

Lu dans Le Monde, dans le numéro spécial consacré cette semaine à « L’engrenage syrien » cet article consacré aux kurdes de Syrie : « Depuis le début de la crise, Damas ménage, avec un soin particulier, la communauté kurde. L’une des toutes premières mesures d’apaisement annoncées par le régime a consisté à octroyer la nationalité syrienne à une partie des 60000 kurdes privés de papiers depuis les années 60. » Question : qui s’intéressait au sort des kurdes avant cette mesure d’apaisement ?

Autre question, en lien, cette fois posée par le candide Stéphane Paoli ce dimanche à l’antenne de France Inter vers midi : mais pourquoi ne s’intéresse-t-on pas plus au sort des Syriens ? : réponse vasouillarde de ses doctes invités. Au risque de lasser et d’agacer, la vérité s’impose, et je la brandirai sans fin : seules les victimes réelles ou supposées de l’Occident intéressent l’Occident.

Massacres de dauphins

Sans aucun rapport : ce même dimanche, une heure plus tard, TF1 présentait un intéressant reportage sur le mystère de dauphins s’échouant sans raison sur les côtes. C’est se donner beaucoup de mal pour bien peu de ces cétacés. Il serait plus urgent de s’intéresser aux massacres auxquels se livrent les Danois des iles Féroé dans le cadre d’un rite annuel initiatique de passage des jeunes hommes dans l’âge adulte.

Le reportage d’Andrija Ilic (Reuters) intitulé « Marée Rouge » me dispensera de beaucoup de commentaires : « les Féroïens préfèrent pratiquer ce qu’ils appellent le « Grindadrap », à savoir massacrer des centaines de dauphins calderon … Au couteau et à la hache. Evidemment ce n’est pas tache facile il faut parfois s’y reprendre 5 ou 6 fois pour réussir à sectionner la colonne vertébrale des globicéphales, ce qui les paralyse, et ensuite leur trancher la gorge. Une boucherie d’une cruauté sans égale ou près de 1500 individus trouvent la mort. »

Le Danemark, c’est bien en Europe ?

Ps : Je viens – enfin – de recevoir la réponse édifiante de France 2 à ma mise en cause du sérieux et de l’impartialité de l’émission « l’œil sur la planète » consacrée à la Palestine.

J’y reviendrai prochainement.

© Gilles William Goldnadel
L'article original peut être consulté sur le blog de Gilles William Goldnadel

 

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