Extrait de LA LETTRE DE VERITAS N° 140 Février 2010

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C’est le premier guet-apens gaulliste qui se met en place, pour Le détailler, nous cédons la place à celui qui fut le parrain de VERITAS, Michel Sapin-Lignières, chef des U.T. :

« Convoqué au Gouvernement Général, le samedi 23 janvier, je fus reçu par le Général Challe et Delouvrier. Je leur ai fait part de mes craintes de voir le moindre affrontement se transformer en émeute. Le Général Challe m’a rassuré en ces termes : « Je ne suis pas un provocateur, les gendarmes resteront consignés à l’intérieur du Gouvernement Général. Ils ne bougeront que si les manifestants veulent s’en emparer. ».

Le lendemain, il tint les mêmes propos à Joseph Ortiz. Je fus rassuré car il n’était pas dans notre intention de refaire un nouveau 13 mai, et la manifestation aurait pu se terminer sans heurt.

Seulement, les « habiles » du Pouvoir n’allaient pas laisser passer cette occasion de briser l’unité nationale. Ils envoient des ordres aux gendarmes qui occupent le Gouvernement Général et, bientôt, vingt escadrons de gendarmerie dévalent en courant les escaliers du Forum en lançant des grenades.

C’est alors que, du Forum et derrière eux, le fusil-mitrailleur tenu par de pseudo CRS ouvre le feu et les balaie ainsi que le camp retranché. Une ou deux armes des U.T. répondent. En quelques minutes d’une extraordinaire densité de feu, les gendarmes, victimes autant que les manifestants de l’horrible attentat, tournoient, s’abritent comme ils peuvent, puis refluent en désordre.

Les paras ne sont pas là. Pourquoi ? Au P.C. de la 10ème D.P. à Hydra, l’ordre a bien été reçu, mais l’officier qui remplace le titulaire, occupé à d’autres tâches, n’a pas lu, tout de suite, l’ordre qu’il vient de recevoir.*

Il le fera quand tout aura été accompli et lorsque les Légionnaires du Colonel Dufour déboucheront du tunnel des Facultés, tout sera terminé. Sur les lieux, ils ne pourront que tendre, entre les gendarmes qui refluent et les U.T. qui n’ont aucune intention de les poursuivre, un rideau de protection au-delà duquel on relève les victimes : 20 morts et près de 150 blessés, tel est le prix de l’échec – car c’est bien un échec pour les « habiles » du Pouvoir, l’affrontement qu’ils souhaitaient entre l’Armée et la population n’a pas eu lieu.

Les preuves irréfutables de ce piège machiavélique ne viendront qu’un an plus tard, au moment où un Tribunal Militaire réglementaire jugea ce premier procès de l’Algérie Française : le capitaine de la Bourdonnaye révéla qu’il avait bien vu un fusil-mitrailleur en batterie sur le bord du Forum. Les juges militaires réagirent vivement à cette déclaration, mais elle fut, ensuite confirmée par le colonel Godard, M. Pierre Ville et M. Prost… Devant tant de témoignages concordants, l’avocat général préféra abandonner la question…

Très récemment, un officier d’un haut grade me confirma qu’il avait eu en mains les douilles recueillies sur l’emplacement du tir de ce fusil mitrailleur. Elles provenaient d’un lot de cartouches qui avait été délivré à une unité de CRS. Immédiatement après les faits, le dépôt du 5ème Chasseur d’Afrique reçut l’ordre de recompléter en munitions les unités qui avaient été engagées le 24 janvier 1960, de sorte que les enquêtes ultérieures conclurent que la consommation de munitions avait été nulle.

Malgré leur échec, les « habiles » du Pouvoir firent d’autres tentatives pour relancer leur mauvais coup. Le mardi 26 janvier, ils essayèrent de remplacer la 10ème D.P. par des régiments du contingent, mais les officiers s’opposèrent fermement à cette solution. Si l’affaire avait marché, ils auraient repris le coup du F.M. dans le dos des appelés, et on aurait pu lire, alors, dans la presse métropolitaine : « Mères françaises, les Algérois tirent sur vos enfants qui sont venus les défendre ».

Fort heureusement, ce plan à échoué, et les « habiles » du Pouvoir durent attendre le 26 mars 1962 pour réussir leur forfait. Ce jour-là, la fusillade de la rue d’Isly verra réussir le plan qui avait été raté le 24 janvier 1960, mais en pire, puisqu’il s’agissait de faire tirer les soldats sur une foule désarmée.

Michel Sapin-Lignières, chef des U.T.

Voir en ligne : http://www.adimad.fr/pour-lhistoire...

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