Lettre virulente de Bernard Debré à Moncef Marzouki

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Lettre virulente de Bernard Debré à Moncef Marzouki
Monsieur le Président,


Nous avons eu le devoir et je dirai la joie de vous accueillir dans notre pays pendant que vous n’étiez pas « persona grata » dans le vôtre. Il est vrai que, pendant longtemps, la Tunisie a été dirigée par un potentat qui s’est largement servi sur les deniers de l’État. Il est vrai qu’il n’y avait pas de liberté en Tunisie. Le système policier était hypertrophié, les gens sur écoute, l’opposition muselée.


Vous avez pu, de la France, mener votre combat. J’imagine que vous avez pu regarder autour de vous dans notre pays ce qui se passait. Liberté religieuse aussi bien pour les catholiques, les juifs que les musulmans. Vous avez vu la tolérance qui régnait chez nous, État laïque acceptant toutes les religions à partir du moment où elles ne sont ni agressives, ni vindicatives, ni totalitaires. Nous avons plus de musulmans en France qu’il n’y en a en Tunisie !


Certes, quand le printemps arabe s’est développé en Tunisie, nous avons commis quelques erreurs. Du moins, la Ministre des Affaires étrangères a hésité et n’a pas vu la profondeur de ce mouvement, de cette aspiration à la liberté. A part elle, la totalité des Français était derrière le peuple tunisien pour son émancipation.


Voici maintenant que le système démocratique a été mis en place. Mais quelle ne fut pas ma surprise, Monsieur le Président, de vous entendre parler de colonialisme en évoquant l’action des Français comme si les maux qui traversaient la Tunisie étaient dus à l’attitude des Français une cinquantaine d’années auparavant, comme si le président Bourguiba, puis son successeur, le Président Ben Ali, étaient des « fantoches », pilotés par la France.


J’ai trouvé, mais beaucoup de mes concitoyens ont également la même opinion, qu’il était un peu trop facile de votre part d’accuser les Français, ficelles souvent utilisées pour minimiser les problèmes intérieurs et focaliser l’attention de vos concitoyens sur autre chose !


Mais là où véritablement la coupe est pleine, c’est quand, il y a quelques jours, vous avez dit aux Français de stopper leur islamophobie ! De quoi voulez-vous parler Monsieur le Président ? La France serait islamophobe alors que les mosquées se multiplient, l’État est laïc et garantit par là, la liberté de culte, alors que dans votre pays, une poussée de l’islamisme conduit les femmes à rentrer dans leur foyer, imposer progressivement la Burqa et, peut-être, prendre le coran, telle la Libye, comme base politique.


J’espère de tout mon cœur que la Tunisie n’évoluera pas vers ce système pour tomber dans un autre totalitarisme. Monsieur le Président, je dirais la même chose à propos de tous les intégrismes. Les pays auraient tout intérêt à disposer d’une législation laïque plutôt que de dépendre d’une seule religion pour leurs lois.


Monsieur le Président, que deviennent les chrétiens dans les pays arabes ? Ne voyez-vous pas qu’ils sont massacrés, leurs églises brûlées et que beaucoup sont forcés d’immigrer ? Alors, il est indispensable de surveiller vos propos !


La France - terre d’asile n’est pas une vaine expression. La Tunisie s’est libérée du carcan du totalitarisme mais comprenez bien qu’il ne faudrait pas qu’elle tombe de nouveau dans l’obscurité ou l’obscurantisme.




Pr. Bernard DEBRÉ

Ancien Ministre

Député de Paris (UMP)



Cette lettre ouverte a été publiée le lundi 2 janvier 2012 sur le site personnel de M. Debré.


Voir en ligne : http://www.atlasinfo.fr/Lettre-viru...

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